Le patrimoine ferroviaire hérité de l’âge d’or du rail est immense. Des milliers de gares ont notamment été mises en service au temps des compagnies. Après trois grandes vagues de fermeture, on n’en compte aujourd’hui qu’un peu plus de 3 000. Si nombre de ces gares fermées ont été tout simplement détruites, il est encore possible de visiter certains de ces monuments du rail.
Ornano, Gérardmer, La Grande Chaloupe, La Beaume, Varen, Pierrefonds… Autant de noms de gares rayés des cartes ferroviaires, disparus des billets de train et oubliés de la plupart des voyageurs. Aujourd’hui, si elles sont exactement 3 029 à toujours accueillir trains et voyageurs, le réseau français en a autrefois compté bien davantage : jusqu’à 13 000, dont près de la moitié assurant un trafic voyageurs. Mais devant les effets conjugués du développement de l’automobile individuelle et du transport aérien, le rail a restreint son intégration dans le territoire français et, de fermeture de ligne en abandon d’arrêts, le désert ferroviaire a gagné du terrain partout dans l’Hexagone. A la campagne, mais aussi en ville ou dans les faubourgs, ces fermetures ont touché tous les Français. A Paris, par exemple, elles sont légion : sur la Petite Ceinture ou encore à Bastille, Orsay ou au Champs de Mars.
C’est la mémoire de ces gares que nous relatons ici et, par ricochet, l’histoire des lieux et des territoires qu’elles desservaient. De la nostalgie donc, mais pas seulement puisque certaines de ces gares, en perdant leur usage ferroviaire, ont parfois embrassé un tout autre destin…
Au tout début de l’aventure ferroviaire, la gare n’est pas encore pensée, le voyageur se rend à l’embarcadère pour monter à bord de ce tout nouveau mode de transport qu’est le train. Née en Angleterre vers 1820, la gare symbolise, comme le chemin de fer, l’industrialisation triomphante. Ainsi, en France, à la suite du succès des premières lignes de chemin de fer mises en service dans la Loire entre Saint-Etienne et Andrézieux, puis Saint-Etienne – Lyon, « l’embarcadère » Saint-Lazare est construit en 1837 à Paris.
Il dessert la toute première ligne, exclusivement dédiée au trafic voyageurs, qui doit permettre aux Parisiens de s’extraire de la capitale pour aller prendre l’air sur la terrasse de Saint-Germain-en-Laye, au pied du château éponyme, via la gare du Pecq. La gare de la ville royale ne sera mise en service qu’en 1847.
L’embarcadère ne se trouvait pas à l’emplacement de la gare actuelle, mais à cheval sur les voies, à l’endroit qui est aujourd’hui la place de l’Europe. Le premier bâtiment était une construction temporaire en bois qui faisait suite au tunnel des Batignolles. Une construction en maçonnerie l’a ensuite remplacé.
Dans les décennies suivantes, le réseau ferré va s’agrandir de manière exponentielle, entraînant la construction d’une multitude de gares. Puis, sonnant le glas des grands projets d’un rail civilisateur, pénétrant au plus profond des campagnes, y apportant le progrès et l’action civilisatrice de la IIIe République, les impératifs de rentabilité ont, en trois grandes vagues successives, provoqué la disparition de dizaines de lignes et d’une multitude de gares.
La gare ne peut être réduite à sa simple dimension de « bâtiment voyageurs ». C’est une institution qui com- prend une multitude de réalités, où se mêlent plusieurs professions, où s’élèvent des locaux techniques comme les dépôts ou les ateliers de maintenance. Ce microcosme vit dans un espace vaste, le plus souvent au cœur du tissu urbain. Elle symbolise le déplacement, la vitesse et la maîtrise technique. Elle devient l’icône du progrès industriel, mais aussi de la puissance de l’économie et de la force publique. Mais que devient ce lieu de transit lorsqu’il ne voit plus passer aucun train, qu’aucun couple ne verse des larmes d’adieu, qu’aucun cheminot ne traverse ses voies, qu’aucune correspondance n’est annoncée ?
Les gares sont devenues des lieux emblématiques des villes, des quartiers et des bourgs qu’elles desservent. Leur disparition fut vécue la plupart du temps comme une in- justice, provoquant chez les élus locaux et les habitants d’importants mouvements de résistance. Puis, après que le dernier train se soit arrêté au quai désormais inutilisé, il laisse la place à la nostalgie, à tous ces souvenirs de buffets de gare, de salles d’attente et de foyers cheminots. Une nostalgie qui reste vivace. . . De nombreuses associations de passionnés se sont créées pour tenter de sauver ces bâtiments témoins d’une époque révolue. Que reste-t-il aujourd’hui de ces gares disparues des réseaux, de ces théâtres oubliés où se jouait une comédie humaine faite d’adieux et de retrouvailles, d’attentes inquiètes, d’espoirs contenus dans un billet de train.
L’écrivain algérien Yasmina Khadra rappelait dans son roman Ce que le jour doit à la nuit (2008) que « La vie est un train qui ne s’arrête à aucune gare. Ou on le prend en marche, ou on le regarde passer sur le quai, et il n’est pire tragédie qu’une gare fantôme. » Heureusement, certaines d’entre elles ont trouvé une nouvelle destinée et sont donc encore accessibles aux curieux et aux amoureux du patrimoine ferroviaire. Voici une petite sélection d’anciennes gares, véritables monuments, à visiter…
Embarcadère du Champs-de-Mars

Certaines gares ont des destins hors normes. C’est le cas de l’embarcadère du Champs-de-Mars à Paris, surnommé « Gare Lisch » du nom de l’architecte qui en dessina les plans. Chef-d’œuvre de l’architecture industrielle, elle a vu passer jusqu’à six millions de passagers et connu le voisinage d’une tour Eiffel pas encore iconique. Une première gare avait été bâtie à l’angle de l’avenue de Suffren et du quai d’Orsay afin de desservir l’Exposition universelle de 1867. Puis, elle fut détruite dès l’exposition ter- minée, à l’instar de la ligne construite à cette occasion entre la Petite Ceinture et le Champ-de-Mars. Dix ans plus tard, la Compagnie de l’Ouest a reconstruit la section de cette ligne comprise entre Grenelle-Ceinture et Champ-de-Mars. Le 31 mars 1878, le nouvel embarcadère du Champ-de-Mars accueille ses premiers voyageurs : une nouvelle gare parisienne est née. Son architecture, de fer et de briques vernissées est l’œuvre de Juste Lisch, architecte méconnu du grand public, mais qui a signé plusieurs gares parisiennes : Saint-Lazare, Invalides, Javel ou encore Porte Dauphine. La gare accueillera les visiteurs de deux Expositions universelles (1878 et 1889, une autre gare étant construite pour celle de 1900). La gare est en activité jusqu’en 1894, année où elle perd son trafic voyageurs. Mais elle ne sera pas détruite…
Le 18 juin 1897, un cyclone d’une rare violence ravage Bois-Colombes et Asnières. Les ateliers de la Compagnie de l’Ouest sont dévastés. Le bâtiment de l’ex-gare du Champ-de-Mars est alors démonté, puis remonté pierre par pierre en 1897 dans l’impasse des Carbonnets à Asnières, où un nouveau destin ferroviaire l’attend. Il devient notamment la gare électrique de Bois-Colombes de 1924 à 1936. En 1937, celle-ci est reconvertie en atelier et perd sa fonction de transport de voyageurs.
Les années passent et la gare s’éteint doucement. Un permis de démolir est même accordé le 29 avril 1983. Heureusement, à la suite de la mobilisation de Pierre Tullin, un Asnièrois fasciné par la gare, elle est inscrite à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques (MH) en 1985.
En 2018, la mairie d’Asnières et la SNCF ont obtenu l’inscription de la gare Lisch à la deuxième édition du concours « Inventons la métropole », organisée par la Métropole du Grand Paris. La gare itinérante fait partie des 27 sites sélectionnés dans le cadre de la deuxième édition de l’appel à projets. Mais en 2021, la Métropole jette l’éponge. Finalement, c’est la ville d’Asnières qui devient propriétaire de la gare. Elle a annoncé en janvier 2023 un investissement de 10 millions d’euros pour assurer la rénovation du lieu.
Gare d’Orsay

Lorsque le peintre Edouard Detaille découvre la toute nouvelle gare du quai d’Orsay à Paris, il ne cache pas son admiration : « On me ramène à midi au quai d’Orsay. La gare est superbe : elle a l’air d’un palais des Beaux-Arts. Et le palais des Beaux-Arts a l’air d’une gare. Je propose à l’architecte de faire l’échange, s’il en est temps encore ». A l’époque, l’artiste ignore que son trait d’esprit deviendra prophétie et que la dernière-née des grandes gares parisiennes aura le destin ferroviaire le plus bref d’entre elles, avant de renaître comme l’un des musées les plus visités de la capitale française.
Construite en prévision de l’Exposition universelle de 1900 par le PO (Compagnie de chemin de fer de Paris à Orléans), qui exploitait alors la gare d’Austerlitz, une gare jugée trop excentrée et pas assez prestigieuse pour ses ambitions, la gare du quai d’Orsay va devenir la plus élégante et la plus confortable des gares françaises
Pour son architecte, Victor Laloux, rien n’est alors trop beau pour les futurs privilégiés qui transiteront par Orsay dans un luxe et un confort alors inédits dans une infrastructure ferroviaire. La gare et son immense hôtel de luxe sont achevés en deux ans, le chantier restant ouvert jour et nuit. A l’extérieur, l’architecte a subtilement masqué les structures métalliques (on dit que la gare compte plus de métal que la tour Eiffel) grâce à une imposante et élégante façade en pierre calcaire, assurant ainsi la continuité esthétique avec de prestigieux voisins : le Louvre et les Tuileries.
Orsay est la première gare parisienne à ne pas baigner dans les volutes de la vapeur grâce à un concept alors inédit dans la capitale, la traction électrique, permettant ainsi à l’architecte de construire une verrière entièrement fermée et de s’autoriser toutes les audaces pour la décoration. Les Parisiens y découvriront les « boîtes à sel », ces huit motrices électriques de couleur vert olive, numérotées El à E8, qui assuraient la traction entre les deux gares parisiennes du PO. De 1900 à 1939, la gare est la porte ferroviaire des lignes du sud-ouest de la France. Son luxe en fit également le lieu d’arrivée et d’accueil des grands de ce monde en visite dans la capitale, jusqu’à ce que le train soit détrôné par l’avion pour le transport des présidents, monarques et autres dirigeants plus ou moins éclairés. Mais à partir de 1939, Mercure, le dieu des voyageurs dont le buste surplombe le bâtiment, ne devait plus voir que des trains de banlieue rouler sur les voies. Les installations de la gare étant devenues dépassées, ses quais sont trop courts pour faire face à l’électrification du réseau de chemin de fer et de l’allongement progressif des trains. Bientôt, les grandes lignes sont définitivement rapatriées à Austerlitz. Le trafic ferroviaire cesse définitivement en 1958.
La gare a connu à partir de 1939 une multitude de fonctions : centre d’expédition de colis aux prisonniers pendant la guerre, centre d’accueil des prisonniers et des déportés des camps de concentration à la Libération. Elle servira aussi de décor de cinéma, notamment pour l’adaptation par Orson Welles du roman de Franz Kafka, Le Procès, de refuge temporaire pour la compagnie de théâtre de Jean-Louis Barrault et pour les commissaires-priseurs qui furent privés de toit pendant la reconstruction de l’Hôtel Drouot. Comble de l’affront, on fera même de la gare un vulgaire parking ! En 1973, la Direction des musées de France réfléchit déjà à la création d’un musée dans la gare d’Orsay, où tous les arts de la seconde moitié du XIXe siècle seraient représentés : à Paris, il n’existe aucun lieu couvrant l’ensemble de cette période si riche de l’histoire de l’art. Menacée de démolition – un permis fut même émis, mais heureusement jamais exécuté – la gare bénéficia du renouveau d’intérêt pour le XIXe siècle et fut inscrite à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques (MH) en 1973. La décision officielle de construction du musée d’Orsay fut prise en conseil interministériel le 20 octobre 1977, à l’initiative du président Valéry Giscard d’Estaing.
En 1978, le bâtiment bénéficia d’un classement au titre des MH et l’établissement public du musée d’Orsay fut créé. La transformation de la gare en musée fut confiée aux architectes Bardon, Colboc et Philippon de l’agence ACT-Architecture. Leur ACT-Architecture. Leur pro- jet, sélectionné parmi six propositions en 1979, devait respecter l’architecture initiale de la gare, tout en lui permettant d’assumer sa nouvelle vocation. En 1986, le Musée d’Orsay fut inauguré par le président François Mitterrand. La vision d’Edouard Detaille était devenue réalité, sauvant ainsi la plus chic des gares.
Lyon-Brotteaux

Si Lyon possède actuellement six gares SNCF (sept si l’on compte la gare TGV de Lyon Saint-Exupéry), dont quatre se limitent au trafic TER, la capitale des Gaules en a connu jusqu’à dix ! Quatre d’entre elles ont été fermées : Lyon Croix-Rousse, Lyon Est (toutes les deux détruites), Lyon Saint-Clair et la plus grande d’entre elles, Lyon-Brotteaux.
Cette dernière a été classée au titre des monuments historiques en 1982, la protection concernant les façades et toitures du corps central et des deux ailes, ainsi que la salle des pas perdus et son décor. C’est la gare historique de Lyon. Elle sera malheureusement remplacée par la beaucoup moins jolie gare de la Part-Dieu.
Remplaçant une première gare datant de 1858, la gare des Brotteaux est construite de 1904 à 1908 par l’ingénieur Victor-Louis Rascol et l’architecte Paul d’Arbaut pour la Compagnie des chemins de fer du PLM. Gare de raccordement entre les lignes Paris – Marseille et Lyon – Genève, elle est située dans le glacis intérieur de l’ancien fort des Brotteaux, l’espace laissé vacant par les anciennes fortifications permettant de poser les nouvelles voies sans interrompre le trafic sur les anciennes. Elle est considérée par de nombreux ferrovipathes comme l’une des plus belles gares de France. Le bâtiment-voyageurs, dont la structure est en pierre de taille prélevée dans les carrières de l’Isère, mesure 153 mètres de long. Il se compose d’un pavillon central et de deux ailes. Le pavillon central mesure 46 mètres sur 19 mètres de large. Les deux ailes sont dissymétriques avec une longueur de 46 mètres pour l’aile sud et 61 mètres de long pour l’aile nord.
Son histoire épouse celle de la France : la gare de la place Jules-Ferry joua également un rôle central durant la Première Guerre mondiale dans l’acheminement des soldats mobilisés. Puis, à l’occasion du second conflit mondial, la gare sera un lieu de passage important de l’exode. Ainsi, comme le raconte un témoin dans Témoignage chrétien, une publication alors clandestine : « Nous avons vu, en gare de Lyon Brotteaux, arriver de Lorraine, après 48 heures de voyage, des trains transportant les vieillards de l’hospice de Cic-sur-Seille et les nourrissons de la maternité de la même ville. Du 12 au 22 novembre 1940, 60 trains passèrent en gare des Brotteaux, transportant 57 655 habitants de la Moselle, alors que 13 000 avaient déjà été refoulés en France non occupée. »
Accessoirement, le lieu servit également à un happening culturel resté dans les annales, avec l’œuvre du malicieux Hervé Fischer, L’avant-garde en gare terminus de Brotteaux, réalisée in situ en avril 1979. Lyon-Brotteaux conserva ses activités de gare jusqu’en 1983, date de son remplacement par la gare de la Part-Dieu, située à près de 700 mètres de là, une infrastructure jugée plus à même d’accueillir le tout nouveau TGV. À la suite du déclassement du bâtiment par la SNCF, sa marquise fut démontée. La halle à charpente métallique fut malheureusement démolie. Le bâtiment-voyageurs a conservé son décor d’époque avec des illustrations des paysages traversés par les lignes partant de la gare : un catalogue pour voyageur indécis, fait d’œuvres des peintres Charles Lacour, Antoine Barbier, C. Gìtrier et Clovis Terreire. Ce bâtiment, qui a été réhabilité en 1988, a aujourd’hui une nouvelle utilité. De 2002 à 2006, il a été entièrement rénové par un groupement d’entreprises, retrouvant son lustre d’antan, toujours aussi spectaculaire.
Après quatre ans de travaux, la gare bénéficie d’un nouveau parvis (la nouvelle place Brosset remplaçant l’ancienne avenue), une esplanade où l’on peut se promener, où les enfants peuvent jouer et où le brouhaha des voitures a été remplacé par le son des conversations des clients installés aux terrasses des cafés. Aujourd’hui, la vieille gare n’est pas tout à fait endormie. Un hôtel des ventes, des cabinets d’avocats, des agences d’architectes, et surtout le pape de la cuisine lyonnaise, l’immense Paul Bocuse, a ouvert au sein de la gare l’une de ses brasseries lyonnaises, L’Est.
Gare Transatlantique de Cherbourg

A l’époque de son inauguration en 1933, la gare maritime de Cherbourg est le deuxième bâtiment public le plus vaste de France après le château de Versailles. Elle succède à une gare maritime en pierre, mais plus modeste, construite en 1912.
Sur deux hectares et demi, la nouvelle gare se distingue par des installations ultramodernes dans un style Art Déco très en vogue à l’époque. L’idée des concepteurs du projet est de faire de cette gare la porte d’entrée sur l’Amérique : après avoir emprunté le New York Express à Saint-Lazare, le train-paquebot de la Compagnie Générale Transatlantique (qui a circulé jusqu’en 1974 et le retrait du paquebot Le France), le voyageur embarquait très rapidement pour une traversée transatlantique. Jusqu’alors, les grands paquebots ne pouvaient pas mouiller à Cherbourg. Ainsi, afin de monter à bord du Titanic en 1912, c’est en étant transportés par deux transbordeurs que les 281 passagers du célèbre navire au destin tragique avaient pu embarquer. Le projet d’une gare ferroviaire accueillant les passagers de Saint-Lazare, avec des bassins permettant le mouillage de paquebots à destination des Amériques, voit le jour en 1920.
Cette période est marquée par d’importantes migrations d’Européens épuisés par la Grande Guerre. Les grands ports de toute l’Europe sont assaillis par des foules inquiètes, en quête d’un avenir meilleur de l’autre côté de l’Atlantique. Entre 1920 et 1932, le port de Cherbourg voit passer un demi-million de migrants ! La nouvelle gare fluidifie la circulation des passagers. C’est par quatre voies qu’arrivent les trains, déversant les candidats à la traversée. Ceux-ci s’engouffraient ensuite dans un escalier qui les menait dans la salle des pas perdus, suivie d’une salle dédiée aux douanes. Une fois les forma- lités accomplies, les passagers accèdent aux passerelles et aux paquebots.
A son apogée, la gare maritime recevait jusqu’à sept trains par jours en provenance de Saint-Lazare. Les célébrités aussi étaient du voyage. Cary Grant, Spencer Iracy, Dwight Eisenhower, Duke Ellington, Joséphine Baker, Salvador Dali, Fernandel ou encore Luis Mariano. . . autant de stars qui sont passés par Cherbourg
Bordeaux-Bastide

L’installation de la nouvelle gare suscite une étonnante suspicion de la part du conseil municipal de Bordeaux, réuni en délibération le 13 septembre 1852, quant à la population qu’elle risque de drainer : « Considérant que la gare du chemin de fer et les nouveaux quais de La Bastide appellent dans cette localité une nombreuse population flottante qui doit être l’objet d’une active surveillance au point de vue de la sûreté générale de Bordeaux ; que la commune de La Bastide ne peut disposer d’aucun des moyens de police nécessaires à l’exercice de cette surveillance ; que, sous ce rapport, elle est I… dans l’intérêt du maintien de l’ordre et de la tranquillité du pays. » Egalement appelée « gare d’Orléans », elle voit le premier train en provenance de Paris arriver sur l’un de ses quais après un voyage de plus de treize heures le 17 juillet 1853. Dès le lendemain, un service régulier débute avec deux allers-retours par jour.
Cette gare, d’une architecture inspirée par le néo-classicisme bordelais, est l’une des plus anciennes de France. Elle fut construite de 1851 à 1853 sur la rive droite de la Garonne, sur les plans dessinés par M. Darru, architecte attitré de la compagnie d’Orléans. Gare de tête de ligne avec un plan en « U », sa halle s’est effondrée en 1950 et la statue monumentale de sa façade sur le fleuve a également disparu. La gare se compose à l’ouest d’un bâtiment sans étage, encadré au nord et au sud par deux longues ailes perpendiculaires. A leurs intersections, se trouvent deux gros pavillons carrés. Les salles d’attente de l’aile nord ont conservé leur décor d’origine. Il subsiste également le petit bâtiment des douanes.
Inscrits par arrêté le 5 décembre 1984 à l’inventaire des monuments historiques, plusieurs éléments de la gare sont protégés. C’est le cas des façades, des toitures de la gare et des salles d’attente de l’aile nord avec leur décor. Les façades et les toitures de l’ancienne remise des voitures et du bureau des douanes bénéficient elles aussi de l’inscription. Aujourd’hui, la gare a été transformée en un complexe cinématographique de dix-sept salles, le Cinéma Mégarama. Plusieurs restaurants y ont été créés ainsi qu’une salle de conférences qui accueille des évènements tout au long de l’année.
Néris-les-Bains

Le 15 mai 1931, la Compagnie du Paris-Orléans (PO) a mis en service la ligne Montluçon – Gouttières par Néris-les-Bains – la dernière qu’elle ouvre – pour y dévier la relation voyageurs Montluçon – Clermont. Son impressionnant bâtiment-voyageurs est l’œuvre de Luis Brachet, l’architecte du PO ayant également mobilisé son talent pour plusieurs gares de la région parisienne (Gentilly, Massy-Palaiseau, Cité universitaire de Paris) ou de province (Capdenac). Néris-les-Bains est connu, comme son nom l’indique, pour ses thermes cités dès le XVIe siècle par Rabelais dans Pantagruel, mais déjà appréciés des Romains au Ier siècle de notre ère ! En 1898, la ville a pris un nouveau tournant avec l’ouverture d’un casino afin de compléter l’offre de loisirs avec le théâtre et, naturellement, l’établissement thermal. Plusieurs hôtels sont construits pour accueillir les curistes.
Chacune des deux façades de la gare affiche une succession de pavillons. La partie centrale de la façade ne comporte qu’un seul niveau. Au-dessus de la porte d’entrée des voyageurs, protégée par une véranda, se trouve un fronton triangulaire. Le matériau employé, un grès rose veiné de jaune qui ne provient pas de la région, donne tout son charme à la gare.
Mais celle-ci est arrivée trop tard… De 1930 à 1940, le nombre de curistes ne cesse de baisser… Après moins de huit ans d’exploitation, le service régulier de voyageurs est fermé le 15 mai 1939. Des circulations sporadiques en fonction de la saison thermale seront assurées jusqu’en 1957, puis l’activité voyageurs s’arrêtera complètement. En 1972, la SNCF déclasse la ligne. En 1975, la commune rachète la gare et la transforme en salle polyvalente, dans le respect du patrimoine, notamment imposé par l’inscription de sa façade et de ses toitures aux MH. Le bâtiment-voyageurs est complètement restauré de 2005 à 2009. Finalement, à la place des voies et des quais, un nouveau bâtiment en verre a été construit. En 2011, la gare est devenue après avoir été réaménagée le « Pavillon du lac », un centre qui accueille conférences, congrès ou des évènements privés.
Gare du Midi à Biarritz

Avec sa façade en arcades et ses deux tours édifiées dans un style Art nouveau, l’ancienne gare du Midi est restée un monument emblématique de Biarritz. Edifiée au début du XXe siècle par l’architecte Adolphe Dervaux, qui réalisa également la gare de Rouen, elle doit permettre
de rapprocher le train de la cité balnéaire alors que la gare de la Négresse avait été bâtie en 1864 à l’extérieur de la ville à la demande de l’Impératrice Eugénie. Inaugurée en 1911 pour répondre à l’essor du tourisme dans la région, la gare du Midi était à l’origine un point de départ et d’arrivée pour les trains en provenance de Paris et d’autres grandes villes de France. Elle a joué un rôle important dans le développement économique et touristique de la cité basque, permettant aux visiteurs de rejoindre facilement la station balnéaire. En 1926, l’électrification de la ligne remet en question l’importance ferroviaire de la gare du Midi, seules des navettes faisant dorénavant la liaison avec la gare de la Négresse.
Pendant des décennies, elle a accueilli des trains de luxe, des trains de pèlerins en transit vers Lourdes, puis les trains autocouchettes avant d’être définitivement fermée en septembre 1980. En 1990, l’ancienne gare est réhabilitée. Elle se métamorphose en « Palais des Festivals », accueillant congrès et spectacles dans sa salle de 1350 places. En 1997, la Gare du Midi retrouve son nom d’origine. Un an plus tard, elle accueille le centre chorégraphique national Malandain Ballet Biarritz.
Gare du Sud à Nice

Située à deux pas de l’actuelle gare des Chemins de fer de Provence dans le quartier niçois de la Libération, la gare du Sud ne voit plus passer de trains depuis 1991. Cette année-là, la compagnie ferroviaire qui exploite encore aujourd’hui la ligne de Nice à Dignes déménage en amont de la ligne dans une nouvelle structure moderne et bien plus modeste.
Inaugurée sous le nom de « Gare du Sud de la Compagnie des Chemins de Fer de Paris à Lyon et à la Méditerra- née » (PLM), elle a été construite en 1892 par l’architecte Prosper Bobin dans un style néo-classique. Elle était à l’époque l’une des gares les plus importantes de la ville, assurant les liaisons vers Paris, Lyon et d’autres grandes villes de France. Son immense verrière a été transportée depuis Paris, où elle couvrait le pavillon de Russie et de l’Autriche-Hongrie de l’Exposition universelle de 1889. Après avoir été pendant près de cent ans, le terminus des Chemins de fer de Provence, la gare ferme définitivement ses portes en 1991.
En 2000, l’Etat vend la gare à la ville de Nice. La municipalité prévoit de détruire la halle métallique et sa belle verrière. La façade, elle, doit être démontée. Mais, les riverains et plusieurs associations se mobilisent pour sauver l’infrastructure. En 2004, le ministre de la Culture de l’époque, Renaud Donnadieu de Vabres s’oppose à sa destruction. Un projet de réhabilitation est lancé en 2013 pour transformer le bâtiment en un lieu de vie, de culture et de commerce. Le bâtiment voyageurs devient une médiathèque en 2014. Installée dans une partie du hall des voyageurs, la bibliothèque Raoul Mille s’étend sur quatre étages En 2019, la Gare du Sud a rouvert ses portes après une importante rénovation, devenant ainsi un nouveau pôle d’attraction pour les habitants et les visiteurs de Nice. Aujourd’hui, les gourmands connaissent bien l’endroit… Sous la belle voûte de 18 mètres de haut, la Gare du Sud permet d’effectuer un voyage gustatif à travers les traditions culinaires méditerranéennes. Des stands accueillent les voraces autour du terroir de l’arrière-pays niçois, mais aussi dédiés à la cuisine italienne, espagnole, libanaise ou encore grecque.