À deux heures de Paris en train, Bayeux offre le temps d’un week-end un condensé de la culture et de l’histoire de la Normandie. Cité médiévale préservée, ses musées nous offrent un voyage dans le temps de l’époque gallo-romaine à la Seconde Guerre mondiale, en passant par Guillaume le Conquérant et l’époque moderne.

En sortant de la gare de Bayeux, au cœur du Bessin, il suffit d’accomplir quelques dizaines de mètres pour faire un saut dans le temps et plonger dans l’histoire de la Normandie. Contrairement à nombre de ses voisines comme Le Havre, Caen ou Saint-Lô, Bayeux, pourtant au cœur des combats du débarquement, est sortie pratiquement indemne de la guerre. La cité médiévale est encore debout. Ses maisons à colombage, ses hôtels particuliers, ses églises, ses ruelles : la ville a su préserver ses charmes. Direction le Musée d’Art et d’Histoire Baron-Gérard, où les collections rappellent ce long passé. Étonnamment peu fréquenté, ce musée regorge pourtant de trésors : 800 pièces archéologiques ou ethnographiques, près de 600 œuvres d’art dont 250 peintures et estampes et plus de 2 500 porcelaines et dentelles, deux productions qui ont fait la richesse et la renommée de Bayeux. Dans le musée, nous remontons ainsi une histoire qui débuté à l’époque gallo-romaine, au début du Ier siècle. La cité se nomme alors Augustodurum, un hommage à l’empereur Auguste. Elle devient un carrefour important et s’entoure de remparts au IIIe siècle, un castrum de 400 m de côté. Intégrée en 924 au domaine du chef viking Rollon, premier duc de Normandie, elle devient – après Rouen – la ville la plus importante de la région. Durant la période médiévale, Bayeux connaît se développe et plusieurs bourgs apparaissent à l’extérieur de l’enceinte.
Édifiée en Pierre blanche de Caen, la cathédrale Notre-Dame de Bayeux domine le centre-ville et permet aux visiteurs de se repérer. Fondée par l’évêque Hugues d’Ivry au XIe siècle, sur le site d’un ancien sanctuaire romain, sa construction a débuté en 1047, sous l’épiscopat d’Odon de Conteville, demi-frère de Guillaume le Conquérant. La cathédrale a été consacrée le 14 juillet 1077 en présence du célèbre duc de Normandie. Son architecture gothique normande laisse la place à quelques éléments de style roman, notamment dans la crypte et certaines parties de la nef. Des rénovations et des ajouts importants ont été réalisés aux XIIe et XIIIe siècles. Au XIXe siècle, la cathédrale a subi une importante campagne de restauration dirigée par Viollet-le-Duc.
Le premier reportage de guerre
Longtemps, elle a accueilli la tapisserie de Bayeux, qui était exposée dans la nef à l’occasion des grandes fêtes religieuses. Aujourd’hui, celle-ci s’admire dans un musée qui lui est consacré, dans une salle dédiée, où les photos sont interdites et l’humidité contrôlée. Inscrite au registre « Mémoire du Monde » de l’UNESCO, elle attire de nombreux visiteurs, notamment venus de Grande-Bretagne. Des groupes d’écoliers et des familles traversent la Manche en nombre pour venir découvrir cette part de leur histoire qui s’est déroulée hors de leurs îles.
La tapisserie de Bayeux est peut-être le premier reportage de guerre de l’histoire de l’humanité. Elle détaille étape par étape les événements qui ont conduit Guillaume duc de Normandie à conquérir le trône d’Angleterre, en infligeant une défaite mémorable à l’armée saxonne dans les collines près de la petite ville d’Hastings, le 14 octobre 1066. Les historiens ont, avec ce témoignage direct des événements de l’époque, une formidable source d’information. C’est ainsi grâce à la tapisserie qu’ils ont découvert la forme des boucliers et des épées utilisés par les guerriers normands.

Une autre guerre a marqué la ville. Première ville libérée par le débarquement des Alliés le 7 juin 1944, Bayeux devient le siège de l’administration du gouvernement provisoire que De Gaulle installe dès le 14 juin. C’est ici que le général prend son premier bain de foule. Bayeux entretient la mémoire de cette période à travers plusieurs sites regroupés sur la « Liberty Alley ».
80 ans de mémoire
Le lendemain, direction le Musée mémorial de la Bataille de Normandie. Installés devant le musée, canon, dent de dragon, véhicules blindés annoncent que nous sommes arrivés à destination. Le musée est installé en bordure du centre-ville. Un peu à l’écart de l’animation. A l’intérieur, de nombreuses armes, des reconstitutions et tous ces objets insolites ou usuels utilisés par les soldats dans leur quotidien de militaires.
Non, loin de là, le plus grand cimetière britannique de la Seconde guerre mondiale attire les visiteurs venus rendre hommage à ces jeunes hommes, fauchés dans la fleur de l’âge, pour libérer l’Europe du joug nazi.
Tous les ans depuis 1994, le prix Bayeux Calvados-Normandie des correspondants de guerre est décerné aux journalistes qui nous permettent de bénéficier d’une information indépendante dans des conditions périlleuses. Honorant ces pionniers reporters de guerre, la ville de Bayeux a édifié un monument en leur honneur.

Après cette plongée dans la violence et le chaos de la guerre, c’est l’heure de se mettre au vert. Nous sommes dans l’ancien quartier des tanneurs. C’est le long de la rivière que battait le cœur de la cité médiévale. Aujourd’hui, l’Aure offre une belle promenade au fil de l’eau, rythmée par la rotation des moulins. Deux pas de côté et on longe la rive de la rivière, dérangeant seulement les canards, les libellules et les mésanges.
S. Delziani
Pour venir
- Les trains directs depuis la gare Saint- Lazare accomplissent le voyage jusqu’à Bayeux en 2 h 10. Depuis Caen, 27 trains desservent la ville, dont les plus rapides font le trajet en 15 minutes. www.ter.sncf.com/normandie
- La plupart des points d’intérêt sont facilement accessibles à pied depuis la gare, mais il existe également un réseau de bus baptisé Bybus.
Où manger
- A deux pas de la cathédrale, L’Alcôve propose une cuisine bistronomique de qualité. Au déjeuner, une formule à prix doux à déguster en terrasse avec vue sur le monument religieux.
- Un marché se tient le mercredi rue Saint- Jean et un autre le samedi matin place Saint-Patrice. On y trouve tous les produits du riche terroir normand. Le plus dur est de choisir.
Que faire
• Pendant tout l’été, une navette permet de visiter à partir de Bayeux les plages du Débarquement. L’occasion de visiter les cinq plages baptisées avec les noms de code Utah Beach (secteur américain), Omaha Beach (secteur américain), Gold Beach (secteur britannique), Juno Beach (secteur canadien) et Sword Beach (secteur franco-britannique).
À partir de 5 euros la journée.
Adresses utiles
Installée dans l’ancienne halle aux poissons, l’office du tourisme de Bayeux propose une large documentation. Rue Saint-Jean. Tél. : 02 31 51 28 28.
Musée de la Tapisserie. 13bis, Rue de Nesmond. Attention, le musée le la Tapisserie de Bayeux fermera ses portes au public à partir du 1er septembre 2025 pour permettre plusieurs travaux. Réouverture prévue en octobre 2027. La Tapisserie de Bayeux ne sera pas visible pendant cette période.

Musée d’Art et d’Histoire Baron-Gérard. 37, rue du Bienvenu.Tél : 02 31 51 25 50.
Musée Mémorial de la Bataille de Normandie. Boulevard Fabian Ware.